LE GRENAT DE COUME MAJOU

 

 

Ça y est, nous pouvons vendre notre premier Rivesaltes,

le « Grenat de Coume Majou », millésime 2010.

 

 

 

 

 

 

Le décret, adapté au moment de l’entrée en vigueur du contrôle par l’ODG (organisme de gestion), prévoit qu’il faut 3 mois de vieillissement en bouteilles et donc que les premiers cols ne peuvent quitter le domaine qu’un trimestre au moins après la date de mise. J’aimerais qu’on m’en explique le comment du pourquoi mais .... on fait avec.

 

En ce qui me concerne, je vendange à très haute maturité un grenache de coteau planté en 1963, tout en haut de la Coume Majou, à l’endroit où je me suis retourné avec le chenillard au printemps de 2006. Je n’ose plus me servir de l’engin sur cette parcelle depuis lors. Elle appartenait avant moi à deux « papys » octogénaires, et son rendement varie suivant le régime des pluies et l’humeur des sangliers. En 2010, je suis arrivé à conserver 700 bt de 50 cl, et cette année environ la même chose.

La qualité des raisins est identique à ce que je ramasse au Clots d’en Couloms pour mon VDN de Maury, mais les arômes tirent plus vers le raisin de Corinthe et le pruneau, tandis que le tannin est un peu moins fin. Afin d’augmenter encore la différence entre ces deux produits, je les vinifie différemment : mon Rivesaltes est muté après écoulement, tandis que j’ajoute l’alcool « sur le marc » dans le cas du Maury.

J’essaie d’obtenir le même équilibre sucre-alcool (autour de 85-90 gr de sucre pour 16,5 à 17 vol % d’alcool) et je mute donc autour de 1040 de densité, avec grosso modo 5 – 6 % du volume en éthanol à 96°.

Le résultat est un breuvage à la robe magnifique (non collé car ce mode opérationnel rend la clarification par soutirages successifs très aisée, au pris d’une petite perte évidemment) ... grenat foncé. Le nez de fruits rouges ne trahit pas exagérément la présence d’alcool, tandis que la garrigue estagelloise pointe le bout du nez. Notre ami Jacques Sirre, subtil vigneron au Domaine des Schistes, m’a déjà confié qu’il pense que ce coin de vignes est un des meilleurs de tout notre finage. Or, il élabore lui-même un excellent Maury et sait de quoi il parle. En bouche, le vin doit encore se fondre un peu, non pas que l’alcool brulât, mais bien parce que la « liqueur » (lisez : le côté sucré) pourrait s’harmoniser d’avantage. Encore quelques mois de patience.

 

De l’usage des vins doux naturels (rouges) sans caractère oxydatif :

. Tout d’abord, la tradition les sert à l’apéritif. Moi, ce n’est pas ce que je préfère. Par contre, ils peuvent servir de base à d’excellents cocktails, sous réserve qu’on ne les « massacre » pas. Ajoutez un rien de tonic, de l’angostura, un glaçon et une mini-tranche d’orange, et vous aurez un Byrrh puissance 10, tout en profitant pleinement des arômes et de la trame tannique de ce vin.

. A Limoux, au restaurant Tantine & Tonton, le sommelier vous aromatise une « méthode ancestrale » (= un pet nat*) d’un trait de VDN, le nôtre en l’occurence.

. Moi, les VDN, je les bois ou bien comme ça, pour eux-mêmes, ou bien en accompagnement des fromages à pâte persillée (Gorgonzola, Shropshire, Roquefort, Stilton, Bleu, Fourme d’Ambert ...) ou des fromages de chèvre ou de brebis au caractère crémeux (Banon, Queijo da Serra da Estrela ...).

. Ensuite, bien entendu, dès que l’on dit « chocolat » ou « cerise » ou « framboise », voilà un vin de dessert sensationnel. Essayez la tarte de la Forêt Noire ou une Sacher-Torte !

 

C’est la bijouterie Laviose – que je remercie – qui m’a fourni le motif de l’étiquette. Il s’agit d’une création très réussie qui associe un motif de libellule et des Vigatanes (les espadrilles catalanes traditionnelles), mariant le plus bel or jaune et les grenats.

 

 

*:  un "Pet' Nat" ou pétillant naturel s'obtient sans dégorgement. On laisse fermenter en bouteille le jus de raisin et ... tout s'arrête quand le sucre, l'alcool et la pression du gaz carbonique "écoeurent" les levures.