TOTO EST PARTI

Ce blog voit disparaître trop de gens, ces temps-ci. Il n’a pourtant pas vocation à pleurer.

 

 

Toutefois, ce bonhomme-ci, il manquera beaucoup à ma mère. Et moi, j’en garderai un souvenir triple : une Sunbeam Alpine, son engagement pour sa patrie d’origine et un gynécologue d’exception. Nous ne partagions pourtant pas la même vue sur le monde.

 

Toto (M. le professeur Salvator Levi pour l’état civil), je vous en ai parlé ICI, de manière irrévérencieuse. Son intelligence ne s’en formalisait pas.

 

Ami proche de ma mère, qui lui servait un peu de soeur aînée, il avait épousé la douce et fine Catherine, qui travaillait dans le même service de chirurgie infantile que mon défunt père. Catherine avait pris grand soin de moi lorsque, tout petit encore, il m’arrivait de devoir passer quelques heures dans les couloirs, les pavillons, la biberonnerie ou même ... au bord de la piscine à l’Hôpital Brugmann, tout au début des années ’60. Ces choses se faisaient alors, quand vos pères et mères étaient de garde, le week-end surtout. Et Catherine me faisait rire et oublier l’ennui de ces longues heures. C’est surtout à elle que je pense pour le moment.

 

Une autre fois – il roulait avec prudence dans une Sunbeam Alpine décapotable rouge vif – Toto m’avait convoyé jusque chez ma grand-mère, à Coxyde. La courroie de l’alternateur avait cassé en route et nous avions pris beaucoup de retard : pas de GSM à cette époque et j’ai expliqué en arrivant que nous avions eu un .... askidan. J’avais moins de 5 ans je crois.

 

Au moment des conflits israélo-arabes, Toto - né je crois en Grèce mais je n’en suis pas sûr - avait fort hésité à prendre les armes pour aller défendre ses frères de race. Pourtant, ce n’était pas un sioniste engagé et son existence consistait à donner la vie plutôt qu’à l’enlever. Sa famille, l’amour de ses proches, et un peu ma mère, l’en dissuadèrent. Je pense que ce fut la bonne décision.

 

Toto était un écographiste gynécologique de renommée mondiale, mais avant cela avait excercé la gynécologie clinique et l’obstétrique avec brio. Ses patientes l’adoraient littéralement : il était brillant, doux, rassurant et faisait tout bien. Ce n’est pas trahir le secret professionnel que dire qu’il fut le gynéco traitant de certaines de mes amours de jeunesse ... à ma plus grande satisfaction !!!!! Et c’est tout naturellement sa remplaçante qui devint l’accoucheuse de ma belle-soeur d’abord, de la mère de mes fils ensuite.

 

Toto souffrait de coronaropathie depuis très longtemps. Il avait subi de nombreuses interventions et persistait – c’est à son honneur – à mener une vie aussi active que son état le permettait, fantastiquement aidé par sa femme, qui dissimulait au mieux son angoisse. Et un jour, ce myocarde n’a pas pu aller plus loin.

 

Je pense que Toto a vécu pleinement. Je pense qu’il a eu la chance de rencontrer une femme d’exception et de voir pousser – parfois avec quelques frictions, c’est inévitable – des enfants que je connais mal mais à la personnalité forte.

 

Toutes mes pensées vont vers eux.

Lui, s’il existe vraiment

des Tables de la Loi, des Tribus, un Jugement Dernier,

je sais qu’il sera du bon côté.

 

 

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