HELIOS S’EST ENFIN REMONTRÉ

Syrah à Alt de Coume Majou
Syrah à Alt de Coume Majou

 

 

Ce matin, le vrai printemps semble vouloir s’installer. Nous sommes montés

à la Coume Majou,

délaissée pour un temps à cause des intempéries.

 

 

 

Il reste une grande partie de la syrah à y tailler, en retard car vent, pluies diluviennes, gel, voyage en Belgique et épisode viral en ont décidé ainsi.

 

Les abeilles aussi souhaitent rattraper leur retard, virevoltant de fleur jaune en fleur jaune car c’est pour l’instant l’ajonc épineux (Ulex europaeus) qui domine le paysage floral. Je n’aime pas cette plante invasive car d’une part elle vous esquinte les mains quand par hasard elle s’est immiscée sous le rang, et d’autre part, elle asphyxie le pied de vigne à proximité. Or, ignorée l’été d’avant (paresse, lassitude, inattention, surcharge de travail), elle flambe en début de printemps au moment où on n’a pas pris le seul outil qui en vient à bout : la « piquette ». Donc nos butinantes ouvrières s’en donnent à coeur joie tout autour de la vigne, ne s’intéressant d’ailleurs pas du tout à nous. Il faut dire qu’une vingtaine de ruches ont été implantées un peu plus haut.

 

Enfin, par-ci par-là, de jolis petits papillons aux ailes blanc-vert clair s’ébattent : je pense qu’il s’agit de piérides du chou (mariposa de la col) même si je n’ai pas pu m’approcher pour distinguer l’apex ou le point de couleur noire.

 

Christine et moi avons taillé ce matin les 6 rangées figurant à droite sur l’illustration: le dessus est assez maigre (manque d’eau et concurrence de la garrigue) mais le bas nous a obligés à arracher d’immenses sarments entrelacés aux fils supérieurs. C’est ma seule parcelle palissée et elle fait appel à des muscles qui se font oublier ailleurs : pour l’instant, c’est la zone sous-clavière qui rouspète et un peu le bas du triceps; normal.

 

Les espèces de longues « herbes » encore debout que vous apercevez correspondent souvent à du fenouil sauvage. D’ici un mois, peut-être même avant, il faudra que la débroussailleuse passe sous le rang. Lisez : moi. Quant au chiendent, discret l’an passé à cause de la sécheresse, il a déjà flambé. Ça, c’est le travail du tracteur et de l’actisol et j’attends que José ait une matinée pour lui régler son compte, une fois qu’on aura passé le ramasse-sarments.

 

Par contre, les taches d’un vert plus soutenu que vous voyez sur les sommets de rangée représentent pour moi une première depuis que je suis là : il s’agit de trèfle. Il y est venu tout seul. Dans des zones à réserve en eau meilleure que chez nous, on apprécie cette légumineuse dans l’entre-rang car elle fixe bien l’azote. Chez moi, j’espère qu’elle ne va pas me boire toute l’eau disponible en débordant sous le rang. Il faudra que j’en parle à l’oenologue, qui est aussi agronome.

 

Je rappelle aux lecteurs occasionnels que le Domaine de la Coume Majou n’est pas certifié en agriculture biologique – je n’aime pas trop les labels et encore moins les dossiers administratifs à monter pour les obtenir – mais que nous n’utilisons plus de désherbant depuis 5-6 ans, tentant de labourer partout où c’est possible. Le reste est maintenu (presque) propre à la débroussailleuse, activité vite lassante, pénible sous la chaleur et bruyante ; sans compter le mélange deux-temps utilisé pour la machine. Vous voyez que l’écologie, ce n’est pas si simple !

 

Les plus perspicaces d’entre vous auront remarqué quelques vignes manquantes, alors que la syrah de Majou fut plantée en 2002, que je l’ai reprise en 2005 en installant le cordon de Royat, qu’on ne lui demande pas trop d’efforts (entre 15 et 20 hl de rendement suivant le millésime) et que je n’y ai jamais observé de mildiou. Il s’agit là sans doute de ce que les spécialistes appellent maintenant « la maladie de la syrah » dans le Roussillon mais aussi tout le sud de la France (Rhône méridonal, Languedoc, Tarn ....) sans doute le résultat de la plantation massive de clones et/ou de porte-greffes incomplètement adaptés depuis les années ’80, de techniques de greffage imparfaites, d’hormones utilisées par les pépiniéristes ou de rendement excessif dans les années qui suivent la plantation. Les pistes infectieuses - virus, champignon, bactérie – semblent moins probables. Bref, il n’y a rien à faire.

 

Juste à titre de comparaison, le carignan de la Loute, planté en 1922, se situe 30 mètres plus haut, en plein vent, sur un schiste encore plus dur et ... il va bien, merci.

 

Là, dans le calme de ce piémont des Corbières, coincé entre 3 murs de calcaires, mes éboulis schisteux et toute la Coume qui s’ouvre sur le Fenouillèdes au loin, on profite de la plénitude du matin, puis des premières caresses du soleil lorsqu’il pointe au-dessus de la colline, et enfin du vent (tramontane aujourd’hui) qui se lève vers 11 heures habituellement, un peu après la détonation de la carrière à Tautavel.

 

Toutefois, quand vient midi – on le voit bien malgré l’absence de porte –

c’est fourbu que je regagne Corneilla,

où d’autres tâches m’attendent l’après-midi.

Je sais que les agriculteurs « purs et durs », ceux qui sont nés dedans,

affichent un peu de condescendance à l’égard de mes « demi-journées ».

Je les laisse dire. Moi, cela me convient ainsi.

 

 

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