MA VENGEANCE SE MANGERA CHAUDE

Un de moins !
Un de moins !

Cette année – voir aussi l’intervention de Michel Smith (ICI) – les sangliers ont prélevé une taxe insupportable sur mes vignes, et sur celles des autres, pourtant moins isolées. Comme si nous avions besoin de cela.

 

 

Entendons nous bien, ils sont chez eux, là-haut dans les collines. Et la tradition cynégétique fait pour moi partie des plaisirs de l’existence pour toute une fraction de la population rurale européenne, même si je ne suis pas chasseur moi-même.

 

Mais ...

On nous dit, dans les P.O. – mais je n’ai pas de quoi vérifier les chiffres – qu’il y a environ 10.000 chasseurs encartés dans le département, et qu’ils abattent 8.000 sangliers par an. Moins d’un sanglier par chasseur à l’année, je trouve cela peu. On nous explique aussi qu’il faudrait en supprimer 15.000 pour arriver à l’état d’équilibre.

 

A Bandol, mon ami Achille Pascal, fondateur avec Lili du Domaine le Galantin au début des années ’70, m’a expliqué que l’ACCA de son coin a organisé plusieurs battues nocturnes, « au lamparo », et qu’il s’en est abattu jusqu’à 20 ou 30 en une sortie, sur un même secteur, que l’on est venu récupérer le lendemain, une fois qu’il faisait jour.

 

Dans la Saar, Egon Müller (der Vater) m’avait expliqué qu’on engageait des chasseurs professionnels, déjà dans les années ’90, avec comme mission de décimer la population porcine en liberté. Ils étaient payés à la pièce.

 

Pourquoi en sommes-nous arrivés là ?

 

Il y a certainement plusieurs explications. Tout d’abord, une série d’hivers moins rudes a laissé survivre les petits, qui autrefois succombaient aux conditions plus drastiques. Ensuite, des chasseurs à la vue courte ont croisé les races sauvages avec du porc domestique, pour que les portées soient plus nombreuses. Les laies mettaient souvent bas deux marcassins, alors qu’il n’est pas rare de voir une femelle suitée de 6 ou 7 petits à présent, voire plus. En outre, cela a rendu l’animal moins craintif envers l’homme : à Montner, la nuit, les sangliers font les poubelles dans le village, comme un vulgaire renard. A Estagel, on en a retrouvé plusieurs dans la cour de l’école le jour de la rentrée des classes, quelques années en arrière. A Gérone, grande ville pourtant, les tireurs de la Guardia Civil ont abattu plusieurs vingtaines de bêtes dans un quartier de la ville qui avait été bouclé pour l’occasion. En outre, la vigne de coteau se raréfie et donc celles qui subsistent – les miennes notamment – reçoivent la visite de hordes de plus en plus nombreuses, car elles se rabattent sur ce qu’elles trouvent. Enfin, le reste de leur alimentation fait défaut (sécheresse, pollution, développement urbain, surpopulation porcine ...) et la bête doit compenser.

 

Je vous montre – et le néphrologue que je fus ne peut s’empêcher d’exposer un rognon, lisse comme celui d’un cochon bien sûr, dont le pôle à « morflé » (hématome) – le cuissot et la palette avec le membre antérieur qui régaleront, je l’espère, mes hôtes de ce soir. Il faudra hélas que je cuise tout cela au-delà de mon goût personnel, car l’échinococcose est endémique chez cette espèce.

 

La carcasse d’un demi-sanglier de l’année, splendidement dépecée, m’a été offerte hier. Il y a battue le mercredi chez nous. J’ai découpé notre dîner et laissé pour plus tard le train de côtes et surtout l’échine ... donc un filet.

 

L’année de mon installation, les chevreuils – prédateurs moins nombreux et beaucoup moins destructeurs – avaient dévoré une parcelle à la Coume Majou. L’excellentissime Inada Saburo, qui avait eu vent de ce désagrément, m’a reçu dans son restaurant à l’époque avec ... des rillettes de chevreuil : « Tiens, ta vengeance ! » m’avait dit ce philosophe Zen !

 

 

Cette fois, c’est bien chaud que je vais m’enfiler le plat de la vengeance.

Et la saison ne fait que commencer !

 

 

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Commentaires: 1
  • #1

    David Cobbold (jeudi, 10 octobre 2013 14:27)

    mange ton ennemi et tu auras ses qualités