LE PETIT JURY MEDITERRANEEN




Comme ces pigistes prolifiques

qui font plusieurs copies

au départ du même matériel,

je vous présente deux bouteilles

en tête-à-tête.









Je souhaitais un vin rouge léger mais ferme pour accompagner un faux-filet. Je

vous l'ai décrit ICI. Et il me fallait le même genre de bouteille pour arroser un petit pigeon de bouche fraîchement sacrifié. Voir ICI


Par un hasard (?) amusant, on m'avait offert une jolie bouteille d'un vin célèbre de Cantenac, millésime 1985, tandis que je possédais une caisse du vin élaboré par la même équipe, mais en son nom propre, en 1986, sur un domaine voisin. Il était tentant de les comparer: ce noble et ce roturier.


La famille Chardon a été la cheville ouvrière du cru Palmer (les Sichel, les Mahler-Besse, les Miailhe, les Ginestet etc ...  les ont "employés" au fil des années). Elle a aussi dirigé la destinée de la commune de Cantenac, en occupant la mairie assez longtemps. Elle possédait deux hectares de vigne sur un sol similaire, des graves arrachées aux Pyrénées durant le Quaternaire. Ma conviction est que la roche n'influence le vin que dans la mesure où c'est elle qui gère en partie le cycle de l'eau et détermine l'enracinement, de même que le sol de surface détermine la manière dont les nutriments seront disponibles et en quelle quantité. Il est faux de croire qu'un sol "acide" produit des vins vifs, qu'un sol caillouteux produit des vins  "minéraux" ou "salins", qu'un sol "gras" produit des vins lourds. Non, mais la qualité de la roche-mère, le type de couche arable et le régime des pluies vont modifer en profondeur le métabolisme de la plante. Ca, c'est certain. 


L'encépagement des deux domaines est similaire: du cabernet et du merlot en proportion comparable, et un peu du longtemps fantomatique petit verdot, réputé plus capricieux dans son processus de maturation.


Ensuite, les millésimes jouent un rôle en terre d'Aquitaine. Ici, 1985 fut très bon, avec beaucoup de soleil et peut-être un petit manque d'eau par moments. Par contre, 1986 a livré tout ce qu'un vigneron girondin demande, presqu'à la perfection. 


Je ne vais pas vous faire le coup du grand comparatif, car je ne suis pas le grand comparateur. J'ai déjà avoué ma tendance à être un "nosey parker", mais pas un Bobby Parker. De même, il me plaît de faire la petite souris* qui met son nez partout, mais je ne jouis pas du prestige de François ... Mauss ni de son GJE. J'y compte un ou deux camarades cependant, et même un ami au moins. 


En gros, nous avons bu deux très bons vins. Le 1985 avait un côté légèrement brûlant mais sans que cela ne dérange, et le merlot exprimait parfois ce côté "métallique", comme la Tinta Barocca des Portugais, qui caractérise certains pomerols aussi. Il aurait pu attendre encore un peu pour calmer sa finale. En revanche, le 1986, qui survivra encore, a atteint son apogée et montre beaucoup plus d'harmonie et de finesse. Est-ce mon côté "peuple", je préfère le bourgeois au GCC ? Non, je crois que le millésime y est pour beaucoup. 1986 est d'ailleurs le dernier où j'ai acheté moi-même des vins de Bordeaux en quantité significative, et je ne le regrette pas. J'ai revendu la plupart d'entre eux au moment de mon départ vers la France et ... je bois les survivants à mon aise. 


Cool ! 


* Mon trait d'esprit ne marche que si on précise que "souris" se traduit par

  "Maus" en allemand. 





Écrire commentaire

Commentaires: 0