UN SOMMET DE GAMME EPHEMERE
Un vacant communal planté en 1987 face à la butte de Força Real m'a coûté sang et eau depuis mon installation en 2005:
le Roc Blanc.
Il s'agit d'un terrain dont le sol appartient à la municipalité – qui le loue à ferme – mais où on est propriétaire du matériel végétal.
La vigne était envahie de ronces au début et il y poussait même des chênes verts: rendements ridiculement bas (manque d’eau chronique), pas de maladie et qualité exceptionnelle du raisin ... quand il y en a.
Nous y avons créé des passages pour le tracteur et avons entrepris, patiemment, d’améliorer la couche arable (labourage soigneux, éclatement des blocs de schiste, apport de fumure organique).
J’appellais cette parcelle « ma piste d’atterrissage », les photos montrent pourquoi. Bien souvent, la maturité du jus y est atteinte à la mi-septembre mais il faut attendre le début octobre pour que les peaux me plaisent également.
En 2011, le carignan a atteint
un niveau inégalé
(et un degré alcoolique record).
J’en ai gardé une partie pour la Loute – c’est vous dire ! – et j’ai assemblé le reste à tout le grenache du lieu-dit, magnifiquement mûr.
Cela nous a donné 10 hl de la Cuvée du Roc Blanc,
que je rêvais d’élaborer depuis très longtemps.
Vous m’aurez compris : 2 ha de vigne pour 10 hl de vin fini
On tourne à 7 hl/ha !
On a mis la Cuvée du Roc Blanc
en bouteilles le 3 avril 2012, sans aucun ajout de sulfite (SO2 libre = 0 gr/l)
ni aucune filtration, mais dans de belles bouteilles allongées pourvues d’un bouchon de verre (système Vinolok).
Nous avons dégusté un exemplaire quelques jours plus tard : il se présentait parfaitement bien, avec un nez très ouvert, sur le fruit noir très mûr (cassis, myrtille) et les senteurs de garrigue (thym, fumée, réglisse ...).
Je regoûte ce vin à intervalle régulier: il constitue mon sommet de gamme absolu depuis que la Cuvée du Casot a été sévèrement grêlée en juin 2010 et a de facto disparu.
Nous avons progressivement proposé le Roc Blanc à la vente au domaine et à certains restaurateurs de prestige. Nous ne disposions en effet que d’un bon millier de cols environ au total.
Malheureusement, la sécheresse implacable a continué et l'aridité spontanée de cette parcelle ne m'a pas permis de reproduire cette cuvée, ni même d'obtenir une récolte significative, année après année (20012, 2013, 2014; 2015 ...).
La mort dans l'âme, j'ai donc signalé à la commune que je souhaitais suspendre ce fermage, que personne n'a désiré continuer. La vigne a été dévitalisée et la garrigue a repris ses droits dans ces lieux sauvages, patrie des sangliers.
Une belle histoire qui se termine.